EDITORIAUX 2008
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Juin 2008 Tout le monde l’admet désormais, en prospective le paysage est préoccupant : les menaces dans les domaines de l’environnement, de la démographie, de l’approvisionnement énergétique et alimentaire sont bien réelles et pourraient, très vite, entraîner une cascade de conséquences. Quelque chose s’est mis en mouvement dans le monde, nous entraînant vers le pire… ou le meilleur. Que l’on nous permette de consacrer quelques lignes à un autre aléa : les risques de dérive que comportent les initiatives destinées à lutter contre ces menaces que les acteurs politiques et administratifs sont légitimés à prendre. Ces risques sont sérieux : dans le monde entier, la situation nouvelle et les craintes qu’elle suscite renforcent le rôle des Etats, simultanément dans la redéfinition de leurs missions et la recherche de nouvelles formes de protectionnisme, avec l’appui des électeurs. En France, où le rigide corset réglementaire était en train de se relâcher, il se reconstitue sous de nouveaux prétextes. Toutes les collectivités, entre autres les plus modestes, engagent des promotions entières d’arrogants jeunes « experts », qui s’attribuent la légitimité nécessaire pour intervenir dans la vie des gens et des entreprises. Notre tradition bureaucratique et paperassière se trouve revitalisée par un nouvel attirail de régulations, contrôles, interdictions, obligations, tracasseries… Ce pouvoir public peut revêtir des formes quasi totalitaires et s’appliquer à tous les domaines sur lesquels il plaira à une quelconque autorité de se pencher. Il s’appuie sur un néo-puritanisme écologique. Il proclame son impartialité, non démontrée, et jette une sorte de suspicion a priori sur tous les autres acteurs. On comprend les jeunes Français : selon leur tempérament, ils s’expatrient… ou passent les concours administratifs. Nous ne sommes pas encore inquiets, car la France est fondamentalement une nation démocratique. Mais en prospective, nous sommes déjà préoccupés. En effet, l’attirail public n’est pas efficient, quoique disent ceux qui le mettent en oeuvre ; les mots à la mode (régulation, norme, gouvernance…) recouvrent trop souvent ces pratiques contre-productives et bien connues que sont l’interdiction, le rationnement, la centralisation. Il fait obstacle à la préparation de l’avenir, dont chaque hiérarque affirme qu’elle est au centre de ses pensées. Nous abordons l’avenir tous freins serrés car, dans ce contexte hyperadministré, l’initiative, le sens de l’adaptation, l’esprit d’entreprise sont célébrés mais de fait juste tolérés, voire punis. Le discours sur l’innovation est partout répandu mais comment l’innovation peut-elle surgir alors que les carcans sont partout ? En face des menaces d’environnement et autres, l’évocation des libertés et des droits des personnes commence à faire mauvais genre. Armand Braun |
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Citation
« Le pilote expert et adroit ne navigue pas à l’arbitre du vent ; au contraire, utilisant sa force, il dispose ses voiles de telle sorte qu’elles le mènent au port désiré… Il n’y a pas de navire plus dangereux que la couronne, exposée aux vents de l’ambition, aux écueils des ennemis et aux bourrasques du peuple… »
Diego de Saavedra Fajardo, diplomate et écrivain espagnol (1584-1648) – cité par Michel Le Bris in « D’or, de rêves et de sang »
Clin d’oeil
« Chagall a peint le plafond de l’Opéra de Paris à 77 ans et Verdi composé « Falstaff » à 80 ans. Claude Monet a achevé « Le Pont japonais » à 82 ans, et Martin Scorsese, « Killers of the Flower Moon », à 81 ans. »
Erwan Le Morhedec – Le Figaro – 9 février 2024
Rencontre
Le coin du poète
Dans le marbre de ta mémoire
Dans le marbre de ta mémoire
Je graverai mon nom
Afin que jamais tu n’oublies
Les traits de mon visage
L’amour qui nous avait unis
Nos envols sur la crête des vagues
Et le sombre et profond silence
Des nuits où nos doigts enlacés
Nous écoutions sonner nos cœurs à l’unisson
Dans le marbre de ta mémoire
Je veux inscrire ces matins
Où les rais d’un soleil ardent
Te délivraient de ton sommeil
Où dans le trait des hirondelles
Griffant l’immensité du ciel
Montait le parfum du printemps
Où nous rêvions à tire d’ailes
De les y rejoindre en volant
Dans le marbre de ta mémoire
Je veux ciseler l’éphémère
Compter les jours où nous vécûmes
Les jours où nos âmes mêlées
Les nuits où nos corps enlacés
Nous suivions les portées du désir
Comme un archet au bout des doigts
Nuits où le murmure de ta voix
Chantait la salsa du plaisir
Dans le marbre de ta mémoire
Je veux être mort ou vivant
Le glyphe que l’usure du temps
Ne peut effacer ni détruire
Jean Recoing